mercredi 30 mars 2011

Les insurgés libyens reculent dans le golfe de Syrte

Les insurgés libyens reculent dans le golfe de Syrte

Face à une armée régulière supérieure en nombre et meilleure tacticienne, les insurgés libyens ont battu retraite mercredi sur le littoral du golfe de Syrte, montrant leur faiblesse en l'absence d'un appui aérien allié capable de retourner la situation en leur faveur.

LES INSURGÉS LIBYENS RECULENT DANS LE GOLFE DE SYRTE


Ces revers sont intervenus deux jours seulement après un week-end de victoires en série pour les adversaires de Mouammar Kadhafi repoussés de ville en ville sur la route stratégique longeant le littoral méditerranéen en direction de Syrte, ville natale du "Guide".

L'armée restée fidèle au dirigeant libyen a, dans un premier temps, tendu une embuscade à un convoi hétéroclite de pick-up et de voitures particulières rebelles devant Syrte avant de les déborder dans le désert à l'occasion d'une manoeuvre demandant la sorte de discipline qui fait entièrement défaut aux insurgés.

Les localités de Nofilia, Bin Djaouad et Ras Lanouf sont ainsi rapidement tombées l'une après l'autre dans le cadre de la contre-offensive éclair de l'armée de Mouammar Kadhafi.

Les rebelles n'ont apparemment pas essayé de tenir à Brega, la ville située après Ras Lanouf, et ont poursuivi en direction d'Ajdabiah où certains d'entre eux se sont regroupés. Des dizaines de pick-up équipés de mitrailleuses se tiennent à la sortie ouest de cette ville où la confusion paraît grande.

Interrogé sur ce qui se passe, un insurgé répond: "On ne sait pas. Ils disent qu'un groupe de partisans de Kadhafi est peut-être en train d'arriver en provenance du Sud."

Cela voudrait dire un autre mouvement latéral important à travers les immensités désertiques.

ESCARMOUCHES À MISRATA

Dans toutes les localités, l'armée loyaliste s'est livrée à de violents bombardements de blindés, de pièces d'artillerie et de roquettes Grad montées sur des camions pour faire fuir ses adversaires.

Sans soutien aérien occidental, les insurgés semblent incapables d'avancer ou même de tenir des positions face aux blindés de Mouammar Kadhafi.

Des avions militaires ont bien survolé mercredi le champ de bataille, sans toutefois bombarder apparemment les forces régulières libyennes.

A l'ouest de Syrte, le blocus du port de Misrata, ville tenue par les insurgés à 220 km à l'est de Tripoli, a été levé, ce qui a permis à deux navires de débarquer de l'aide humanitaire et d'évacuer des blessés, a déclaré un porte-parole des rebelles. Selon lui, les combats de mardi ont fait 18 morts parmi la population civile.

Des escarmouches opposent toujours dans la troisième ville de Libye les insurgés aux forces gouvernementales, dont les chars poursuivent leurs bombardements, a-t-il dit.

Les forces rebelles manquent de formation, de discipline et de commandement, sans parler de leur équipement souvent hétéroclite et parfois obsolète. Malgré leur courage et leur enthousiasme, ils ont tendance à s'égailler comme une volée de moineaux à chaque fois que les gouvernementaux commencent à tirer de façon nourrie.

"Cette révolution n'a que cinq semaines, elle est très organisée au plan politique", explique Moustafa Gheriani, porte-parole de l'insurrection à Benghazi. "Il faut normalement six mois pour former un soldat (...) Il s'agit ici de simples citoyens qui prennent des fusils pour défendre leurs biens."

AVERTISSEMENT DE LA RUSSIE

Sur le plan diplomatique, au lendemain de la conférence de Londres, la Russie a mis en garde les Occidentaux contre la tentation d'armer les adversaires de Mouammar Kadhafi et souhaité que l'avenir de la Libye se forge sans ingérence extérieure.

Le Premier ministre britannique, David Cameron, en pointe dans l'affaire libyenne avec le Français Nicolas Sarkozy, n'a pas exclu mercredi la fourniture d'armes aux insurgés tout en précisant ne pas avoir pris de décision à ce sujet.

A Tripoli, le ministère des Affaires étrangères a estimé que la proposition française d'armer les rebelles était contraire aux résolutions des Nations unies et équivalait à soutenir le terrorisme.

A Pékin, le président chinois Hu Jintao a déclaré à son homologue français que la sortie de crise passait par le dialogue et non la force.

A Kampala, le gouvernement ougandais a fait savoir qu'il serait éventuellement prêt à accueillir Mouammar Kadhafi si le n°1 libyen acceptait de quitter le pouvoir qu'il exerce depuis plus de 41 ans sous la pression internationale.

Enfin, les autorités de Tripoli ont expulsé mercredi l'un des envoyés spéciaux de Reuters en Libye, Michael Georgy, sans fournir d'explications.

Avec les correspondants de Reuters dans la région et la rédaction du Caire, Jean-Loup Fiévet pour le service français, édité par Gilles Trequesser