lundi 28 mars 2011

La majorité entre dans une zone de turbulences

La majorité entre dans une zone de turbulences


 La défaite de l'UMP aux élections cantonales et des sondages défavorables font entrer la majorité dans une zone de turbulences et de mise en cause de la stratégie de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2012.

 NICOLAS SARKOZY MET EN GARDE LES DIVISEURS DE LA MAJORITÉ
 Le chef de l'Etat s'est attaché lundi, devant la direction de l'UMP réunie à l'Elysée, à dédramatiser le score relativement faible de son parti (20,21%), la poussée du Parti socialiste (35,73%) et celle du Front national (11,73%).

Selon un participant, il a ainsi fait valoir que tous les gouvernements en place en Europe étaient en difficulté.

Cet argument et celui du malaise provoqué par des crises internationales à répétition semblent faire partie du viatique des dirigeants de la majorité et des membres du gouvernement.

"Je crois d'abord qu'il y a (...) un mécontentement général de tous les Européens, et même dans le monde", a ainsi déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie, Eric Besson.

Mais pour Gaël Sliman, de l'institut de sondage BVA, ces élections sont indéniablement une "gifle monumentale pour l'UMP et Nicolas Sarkozy" après les municipales et les régionales.

"On a beaucoup de mal à comprendre le discours post-défaite tendant à minimiser son ampleur, a-t-il déclaré à Reuters. Le socle de Nicolas Sarkozy se casse et les vases communicants jouent à plein en faveur du FN."

Cet analyste et des dirigeants de la majorité, notamment de sa frange centriste, mettent en cause le virage à droite engagé par Nicolas Sarkozy depuis son discours de juillet à Grenoble sur la sécurité et le remaniement de novembre, qui a mis fin à l'ouverture à gauche et réduit le centre à la portion congrue.

"ERREUR DE POSITIONNEMENT"

Le malaise est sensible jusqu'au sein du gouvernement, dont le porte-parole, François Baroin, a souhaité lundi que le débat sur la laïcité et l'islam en France, voulu par la direction de l'UMP avec le soutien de l'Elysée, soit refermé au plus vite.

Pour lui et d'autres ministres, ce n'est pas là un bon sujet et l'exécutif, comme le parti, seraient mieux inspirés de se concentrer sur l'emploi et les sujets économiques.

Pour l'ancien porte-parole de l'UMP Dominique Paillé, la majorité paye avec le résultat des cantonales "une erreur de positionnement et une erreur de stratégie".

Le sénateur centriste Hervé Maurey dénonce pour sa part un échec de la stratégie "à droite toute" du chef de l'Etat.

"Depuis des mois, nous avons observé une droitisation de la politique menée par le gouvernement qui, à vouloir concurrencer le Front National le légitime", estime le secrétaire général adjoint du Nouveau Centre, une des composantes de la majorité.

Selon un sondage BVA pour Les Echos, 68% des sympathisants UMP considèrent le FN comme un parti comme les autres.

Un sondage Ipsos rendu public dimanche soir place Nicolas Sarkozy derrière le candidat du PS et la présidente du FN Marine Le Pen au premier tour de l'élection présidentielle, ce qui est synonyme d'élimination, dans presque tous les cas de figure.

"L'UMP a perdu une partie du vote centriste sans gagner celui de l'électorat du FN", souligne Hervé Maurey dans un communiqué, en invitant l'exécutif à se "recentrer".

"GROSSES PERTURBATIONS" EN VUE ?

Lors de la réunion hebdomadaire de la direction de l'UMP, Nicolas Sarkozy a répondu à cette admonestation par une mise en garde contre "ceux qui voudraient mettre en cause l'unité de la majorité", a rapporté un participant.

Selon un autre, il a confirmé implicitement sa stratégie de candidat unique de la droite en 2012, contre laquelle s'élève les dirigeants centristes, dont Jean-Louis Borloo.

L'ex-ministre de l'Ecologie, président du Parti radical, a commencé à prendre publiquement ses distances et s'est ému entre les deux tours des cantonales du refus de l'exécutif de donner des consignes de vote au nom du "ni FN ni front républicain".

"On va vers des grosses perturbations à l'UMP", prédit Gaël Sliman. "Elles ont en fait déjà commencé avec l'appel au ni-ni", défendu tant par Nicolas Sarkozy que par le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, mais contesté par le Premier ministre, François Fillon, et ignoré par d'autres ministres.

"L'idée d'un candidat alternatif va faire son chemin, si Nicolas Sarkozy continue d'être derrière Marine Le Pen", dit-il, tout en admettant que ce n'est "pas encore" le plus probable.

Une hypothèse sur laquelle un ministre bien en cour à l'Elysée affirme pour sa part qu'il ne faut pas miser un euro.

Il n'en conseille pas moins à Nicolas Sarkozy de renoncer pour l'heure à faire de la tactique électorale, de se concentrer sur les sujets de fond en attendant que la situation se décante et d'officialiser sa candidature "le plus tard possible".